Habemus Papam - article du journal le Monde

14/03/2013 08:39

Election du pape : une nouvelle "main de Dieu" pour l'Argentine

Le Monde.fr avec AFP |

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Des fidèles argentins exultent devant la cathédrale de Buenos Aires.

Des fidèles argentins exultent devant la cathédrale de Buenos Aires. | AP/Victor R. Caivano

 

Même eux n'avaient pas osé l'imaginer. Après l'annonce de l'élection de Jorge Mario Bergoglio par le conclave, il aura fallu quelques minutes pour que les Argentins, et derrière eux toute l'Amérique latine, réalisent qu'ils le tenaient enfin, "leur" pape. Un peu sonnés par la nouvelle, des habitants de Buenos Aires se sont spontanément massés par centaines devant la cathédrale de leur ville pour célébrer le désormais ex-archevêque de la capitale argentine.

La nouvelle a surpris jusqu'aux responsables de l'Eglise argentine, a admis le porte-parole de l'archevêché Federico Wals. "Bergoglio a voyagé l'esprit tranquille (au Vatican) avec un vol retour prévu en milieu de semaine prochaine", a expliqué M. Wals dans une conférence de presse improvisée devant la cathédrale. Dans les rues de Buenos Aires, plusieurs affichent annoncent encore sa présence aux offices de la Semaine Sainte, a-t-il encore souligné.

"ENCORE LA MAIN DE DIEU !"

"Encore la main de Dieu !" est devenue en quelques minutes l'une des phrases les plus populaires parmi les utilisateurs argentins de Twitter, en référence à la "main de Dieu" de Diego Maradona, qui avait éliminé l'Angleterre de la Coupe du monde de football en 1986. Jorge Mario Bergoglio n'a en effet jamais fait mystère du fait qu'il est supporter du club de football de San Lorenzo, fondé par un prêtre, ce qui le rend d'autant plus populaire dans un pays où le football fait figure de deuxième religion.

Une heure après la sortie de la fumée blanche, la présidente argentine Cristina Kirchner a salué l'élection de Jorge Mario Bergoglio et lui a souhaité une "tâche pastorale fructueuse", dans un communiqué publié par le gouvernement. La présidente a cependant toujours entretenu des relations tendues avec le nouveau Souverain pontife, qui s'était notammentmontré très critique envers les initiatives gouvernementales ayant mené en 2010 à la loi sur le mariage homosexuel et en 2012 à un autre texte autorisant les travestis et transsexuels à déclarer le sexe de leur choix à l'état-civil.

 

De nombreux responsables politiques et religieux d'Amérique latine se sont réjouis de l'élection de Jorge Mario Bergoglio.
De nombreux responsables politiques et religieux d'Amérique latine se sont réjouis de l'élection de Jorge Mario Bergoglio. | AFP/LUIS ROBAYO

 

"LE CONTINENT DE L'ESPÉRANCE"

Mais le choix de Jorge Mario Bergoglio n'a pas comblé que le peuple argentin. Sur ce continent comptant la plus importante population catholique du monde, de nombreux dignitaires religieux et responsables politiques ont fait part de leur joie de voir accéder pour la première fois au trône de Saint-Pierre un religieux d'Amérique du Sud. 

La Conférence des évêques du Brésil s'est félicité du choix d'un pape né "sur le continent de l'espérance". Cette élection "revigore" l'Eglise, selon les évêques brésiliens. "Nous pouvons espérer beaucoup du fait qu'il soit latino-américain", a déclaré au cours d'une conférence de presse le secrétaire général de la Conférence, Leonardo Ulrich Steiner. La présidente, Dilma Rousseff, a pour sa part souligné que "les fidèles" l'attendaient "avec expectative" à Rio de Janeiro pour les Journées mondiales de la Jeunesse (JMJ) en juillet. "Cette visite, dans un laps de temps si court après le choix du nouveau pape, renforce les traditions religieuses brésiliennes et les liens qui unissent le Brésil au Vatican", poursuit le communiqué.

Au Mexique, deuxième pays du continent américain pour sa population catholique, le président de la République, Enrique Peña Nieto, a exprimé sur son compte Twitter son "approbation du choix du premier souverain pontife d'origine latino-américaine". Près de 84 % de 112 millions de Mexicains sont baptisés.

"MATURITÉ" DE L'EGLISE EN AMÉRIQUE LATINE

Cette élection illustre la "maturité et la cohérence" de l'Eglise en Amérique latine, a estimé au Chili l'archevêque de Santiago, Ricardo Ezzati. "Le fait que l'Amérique a en François le premier pape de l'histoire de ce continent qui mène une vie chrétienne depuis plus de 500 ans, reflète la maturité de l'Eglise en Amérique Latine", a-t-il déclaré dans une conférence de presse.

L'Eglise du Costa Rica a quant à elle évoqué une élection "inédite", qualifiée de "tournant pour l'Eglise catholique" et de "surprise" par le porte-parole de l'archidiocèse de San Jose Glen Gomez devant des médias locaux juste après l'annonce. Pour Mgr Gomez, le nouveau pape "est quelqu'un de très proche de notre réalité".

Selon l'évêque uruguayen Luis del Castillo, qui s'exprimait également dans la presse locale, François "a sans aucun doute un profil différent de ceux que nous avons eus" auparavant, ajoutant qu'il s'agit d'un homme "très proche des pauvres".

"L'AMÉRIQUE LATINE FAIT SON ENTRÉE À ROME"

A Cuba, Dionisio Garcia, archevêque de Santiago de Cuba et président de la conférence épiscopale, a déclaré que "l'Amérique latine (faisait) son entrée à Rome, avec un homme de bonne formation, un homme de gouvernement". "Le fait qu'il soit latino-américain signifie que l'Eglise est entrée dans un monde dont l'Europe n'est plus seulement le centre, l'axe, mais bien une société qui comprend tous les pays du monde", a-t-il également dit. "Le fait qu'il ait choisi François comme nom est éloquent. François est celui qui a voulu rénover l'Eglise", selon lui.

En Equateur, le président, Rafael Correa, a qualifié cette nomination d'"historique". "Nous avons un pape latino-américain ! Nous vivons des moments historiques, sans précédents", a écrit sur Twitter le dirigeant socialiste, qui se revendique en tant que fervent catholique, partisan du mouvement religieux de gauche de la Théologie de la libération. Cette élection est un "bonheur" et une "nouvelle extraordinaire" pour l'Amérique latine, a pour sa part déclaré Mgr Antonio Arregui, président de la Conférence épiscopale équatorienne